L’exposition – Les graffitis de l'amphi E http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr Un site i-médiasCommuniquer, s’exprimer, patienter et s’ennuyer à l’université avant les réseaux sociaux (1960-2007). Exposition (Poitiers, 2015) Wed, 03 Oct 2018 14:44:54 +0000 fr-FR hourly 1 http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/wp-content/uploads/sites/123/2018/10/cropped-image_site_512-32x32.jpg L’exposition – Les graffitis de l'amphi E http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr 32 32 Sur les tables de l’ancien amphi http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/lexposition/sur-les-tables-de-lancien-amphi/ Mon, 30 Mar 2015 13:58:47 +0000 http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/?p=59 001_3_200Construit en 1960, l’ancien amphi E occupait les étages supérieurs du bâtiment III de la faculté des Sciences humaines et arts à Poitiers. Le nom de l’amphithéâtre fut choisi en référence à Ernest Martin (1893-1989), professeur de l’université de Poitiers, spécialiste de l’histoire acadienne.
Dans cet amphi de 250 places, les tables en bois portaient, sur une surface d’environ 45 m², un ensemble d’inscriptions et de graffitis datant de 1960 à 2007. Ce corpus nous est connu à travers la couverture photographique des tables réalisée en juin 2007, avant la fermeture du site pour travaux de rénovation et la destruction de l’amphi. Les tables et leurs inscriptions ont aujourd’hui disparu.

Dans l’ancien amphi, le confort était rudimentaire. L’ambiance surchauffée, et alourdie par les fumées de cigarettes jusque dans les années 1980, pouvait favoriser l’endormissement.
001_2_200Les tables étroites et les bancs incommodes ne facilitaient pas la prise de notes. Le grincement de la porte soulignait chacune des arrivées tardives et des sorties prématurées. À une période de fréquentation massive, dans les années 1980, il était préférable de ne pas arriver en retard pour pouvoir suivre les enseignements, et les auditeurs libres étaient alors priés de s’installer au fond de l’amphi. Le bruit des carrousels de diapositives hantait la pénombre et les menus incidents liés aux projections ponctuaient les cours de régulières interruptions.

La lecture des graffitis portés sur les tables dévoile des références éclectiques issues de la culture populaire mêlant principalement musique, jeux vidéo, films et culture télévisuelle.

 

001_200Se côtoient ainsi : Strengh trough purity purity through faith pour la bande dessinée V pour Vendetta d’Alan Moore et David Loyd ; Usual Suspect who’s Kaiser Soze pour le film de Brian Singer ; Sans ma barbe quelle barbe pour une chanson de Corbier ; SNK The future is now pour le slogan d’un éditeur de jeux vidéo…
La culture littéraire ne transparait qu’à travers quelques rares citations d’auteurs comme Victor Hugo ou Oscar Wilde.

Résonne alors encore cette question lancée par un étudiant : Mais que veut dire cette table ?

 

 

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Expérimenter les outils, en quête de visibilité http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/lexposition/experimenter-les-outils-en-quete-de-visibilite/ Mon, 30 Mar 2015 14:25:55 +0000 http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/?p=79 002_200 Les étudiants ont utilisé au fil des années une large palette d’outils pour communiquer sur les tables et ils ont adapté leurs techniques dans l’espoir de laisser une trace visible et durable. Ces outils appartiennent à la culture matérielle de l’étudiant. Ce sont les différentes fournitures de bureau qu’une trousse peut contenir : pointe de compas, stylos à bille de quatre couleurs, feutres et marqueurs, surligneurs fluo et correcteurs liquides blancs – dits blanco en France.
Le chevauchement des inscriptions témoigne d’une évolution des pratiques. Les plus anciennes sont réalisées par des incisions avec une pointe de compas ou en appuyant fortement sur le bois avec la mine d’un stylo à bille. Ces premiers tracés sont de petite taille, généralement en noir ou bleu, plus rarement en rouge ou vert. L’espace utilisé reste limité.

002_5_200Avec le temps, les inscriptions se multiplient et l’encombrement de la surface oblige les étudiants à expérimenter de nouvelles techniques pour assurer une visibilité à leurs contributions plus récentes. Cette évolution répond à la nécessité d’un changement d’échelle face à la surcharge du support, et suit les innovations des fournitures de bureau démocratisées à partir des années 1980. Le blanco et les marqueurs sont les deux outils qui permettent, au cours des années 1990, de donner une plus grande ampleur aux inscriptions.
Conditionné à l’origine sous forme d’un pinceau épais, le blanco était au départ un outil d’un maniement difficile pour des tracés précis et il n’a été que rarement utilisé sur les tables avant les années 1980. Commercialisé ensuite sous la forme d’un stylo, le blanco va se généraliser pendant les deux dernières décennies, et transformer radicalement la physionomie des tables.

002_2_200L’usage du blanco permet à la fois un changement d’échelle et une inversion de valeurs. Les tracés de plus grande envergure se multiplient, jusqu’à se poursuivre sur plusieurs emplacements, comme ces frises de mousquetaires déclinées sur plusieurs tables. Les inscriptions portées au stylo à bille noir ressortent mal sur le support en bois verni d’une tonalité relativement foncée. En inversant les contrastes de valeurs, le blanco offre une meilleure visibilité.
Les aplats de blanco renouvellent aussi l’exploitation de la couleur, lorsqu’ils sont colorisés avec des feutres ou des marqueurs. Le blanco permet également de varier les effets de rendu par des dessins aux points.

Dans cette course à la visibilité dans un espace surchargé, d’autres techniques sont parallèlement utilisées par les étudiants. La pratique de l’encadrement est notamment systématisée par MIKA qui a porté sa signature au feutre rouge sur de nombreuses tables.
003_2_200On trouve aussi ponctuellement d’autres expérimentations, par exemple des ajouts de matières ou des collages : étiquettes de pommes, rubans blancs effaceurs… D’un usage plus limité, la pratique du dessin en réserve est une autre de ces solutions exploitées par les étudiants : les contours sont délimités par des aplats de couleurs, et le bois, laissé en réserve, forme le dessin. Ailleurs, un exercice de grattage esquisse une tête de bonhomme par suppression de la couche de vernis.

La dernière génération d’outils utilisés sur les tables est celle des feutres épais et marqueurs indélébiles qui permettent des dessins de couleurs vives et de grande taille. Ils ont donné naissance à des réalisations de long terme, comme cette frise de personnages inspirés du manga. Paradoxalement, certains de ces motifs les plus récents ne sont pas ceux qui ont laissé le plus de traces, dissouts par les produits d’entretien lors des nettoyages réguliers de l’amphi.

 

 

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Participer à une œuvre vivante http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/lexposition/participer-a-une-oeuvre-vivante/ Mon, 30 Mar 2015 14:36:19 +0000 http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/?p=89 003_200Au-delà des tentatives individuelles pour diffuser un message, l’intérêt principal de cet ensemble est de former une œuvre collective à la fois mouvante et inachevée.
Ce sont tout d’abord les propositions du support qui jouent le rôle d’appel : une trace laissée par un récipient chaud ou une série d’incisions peuvent déclencher l’inspiration et donner naissance à des figures anthropomorphes.

Les dessins existants sont une incitation à la réappropriation et au détournement, dans une démarche proche de celle du cadavre exquis, à la différence que les interventions antérieures sont ici visibles et peuvent devenir source d’inspiration.

Une forme d’entrelacs géométriques est ainsi réutilisée pour constituer la langue d’une figure canine.
002_3_200D’anciens tracés sont soulignés à nouveau avec d’autres outils, recréant ainsi des personnages hybrides, au corps de blanco surmonté d’une tête au stylo, ou inversement. Des visages existants sont remodelés par des apports de blanco ou de feutres : les barbes et chevelures sont soulignées ; des extensions, cornes, coiffures ou lunettes, sont ajoutées. Les regards, surtout, trouvent une nouvelle acuité lorsqu’ils sont sertis de blanc.

On peut noter trois types de comportements vis-à-vis des tracés antérieurs : la superposition indifférenciée, l’accompagnement par l’ajout d’éléments préservant ou annotant le dessin initial, ou encore l’effacement délibéré, plus rarement observé.
Chacune des inscriptions interagit avec le graffiti voisin, mais aussi avec le tracé préexistant et celui à venir. Cette étroite imbrication des éléments rend leur déchiffrement complexe.

 

 

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Marquer sa présence, laisser une trace http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/lexposition/marquer-sa-presence-laisser-une-trace/ Mon, 30 Mar 2015 14:54:17 +0000 http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/?p=101 004_200L’étudiant délimite son territoire dans l’amphithéâtre en apposant son nom ou une date. La fonction première du graffiti se vérifie ici, laisser une trace ou un signe pour rappeler l’existence de son auteur ou simplement son passage.
Les étudiants n’ont généralement indiqué que leurs prénoms, plus rarement leurs patronymes, plus souvent leurs surnoms ou leurs initiales : J.Y. est passé… With Nagui ; Boui et Yote étaient là 26/10/01 ; Alex was here ; Alice was here ; I was here, annoté de Me too ; Baptiste J 01/07 ; Cleme 14/03/07 Langue ; Salut je ne fais que passer C…

Malgré un placement libre certains étudiants délimitent volontairement leur territoire : Ici c’est ma place… Quelques noms, marques distinctives ou citations réalisées par la même main se retrouvent de manière récurrente sur les tables. Ce sont de véritables signatures ou codes, qui ne marquent plus seulement une place en particulier, mais un rang ou l’amphithéâtre dans sa totalité.004_3_200
Les tables sont hantées par MIKA, Nagui et Jack – en référence à l’architecte Jacques Ignace Hittorff – ou encore Aude ; Florent est beau ; Carpe Diem ; Jonquille ; un dessin d’ourson en peluche stylisé… Cet envahissement de l’espace suscite alors les réactions des autres étudiants. C’est ainsi que l’on peut lire : arrète de t’la pèter… j’aime pas les mickaël…, ou : tu m’soul J’en ai marre de t’voir [squatter] les tables !

Les premières dates que l’on recense remontent à l’extrême fin des années 1960. 1969 est la plus ancienne date restée lisible. Cependant, des dates historiques, par exemple 1694 poils aux dents, parsèment également l’amphi et brouillent notre observation.
Les dates les plus anciennes apparaissent sous la graphie de l’année uniquement avec deux ou quatre chiffres. 004_2_200Ensuite, à l’approche du tournant du millénaire, elles s’inscrivent au format jour/mois/année.
Les dates se concentrent à certains endroits où elles se suivent chronologiquement de mains différentes. Des séries se sont créées au fil des années scandant ainsi le temps qui passe. Les inscriptions font parfois même office de calendrier des fêtes qui rythment l’année universitaire : Halloween ; Merry Christmas ; 1er Mai accompagné d’un dessin de brin de muguet à quatre clochettes…

Les étudiants inscrivent où ils sont mais aussi d’où ils viennent, sous forme de slogans régionaux ou identitaires : [Que] Visca Catalunya * IIII, ou par des écrits en langues étrangères comme du chinois, de l’arabe ou du grec… Certains étudiants internationaux venus étudier grâce aux programmes Erasmus et Socrates participent à ce “réseau social” bien plus vaste qu’il n’y parait au premier regard.

 

 

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Esquisser les prémices d’un réseau social http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/lexposition/esquisser-les-premices-dun-reseau-social/ Mon, 30 Mar 2015 15:30:02 +0000 http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/?p=117 005_2_200Si ce que tu as à dire n’est pas plus beau que le silence ! Tais-toi !

L’année 2007 marque la fin de notre corpus de graffitis, avec la fermeture du site des Sciences humaines et arts pour travaux de rénovation. Cette date coïncide avec le développement des réseaux sociaux numériques en France. Certains comportements inscrits sur les tables évoquent les pratiques développées sur les réseaux sociaux. Avant d’écrire sur notre mur ou sur celui de nos amis on écrivait sur les tables. Bien que ce soit plus difficile, et d’une diffusion plus limitée que sur internet, les étudiants échangent, publient des humeurs ou des statuts, discutent et émettent des commentaires.

Certains billets d’humeurs sont très personnels : Cace-dédi à mon poisson rouge décédé ce mercredi 5 déc 2004 ; J’aime pas la soupe aux brocolis
005_4_200À l’instar de ceux portés sur les réseaux sociaux numériques, les commentaires sont souvent dénués d’intérêt : ce sont des “privates jokes”, des délires personnels, des pensées futiles, dont les étudiants ont barbouillé les tables.
Le commentaire est de loin la pratique la plus répandue. Chacun réagit aux inscriptions de ses camarades ou de ses prédécesseurs, et les annote par des remarques souvent sarcastiques ou moqueuses. La citation du célèbre passage d’Hamlet : Être ou ne pas être ? a été soulignée par : T’as trouvé ça tout seul ou tu veux une médaille !?. Une représentation schématique d’un éléphant vu de dos a suscité cette série de commentaires, à l’orthographe approximative, portée par deux mains différentes : je penses que tu n’as jamais vue un éléphant !, suivi d’un tu n’es jamais aller à l’école ?.
On observe aussi d’autres comportements plus “actuels” pratiqués sur les réseaux sociaux comme les sondages.
Un étudiant en a rédigé un – complété par la suite par une vingtaine de personnes 005_3_200
– et destiné à savoir qui regarde la série télévisée L’Inspecteur Derrick. Il existe également un curieux formulaire pour devenir mousquetaire, ou encore un avis de recherche pour retrouver Fabrice, contre la récompense d’un sac à patates.
Figurent aussi un certain nombre de questions ouvertes attendant leur réponse ou de simples interrogations : Une tortue a une carapace ou une coquille ? ; Il n’y a rien après la mort, quel est votre avis ?, ce à quoi une autre personne a répondu : Rien du tout. Heureusement. Il y a que la Vie qui compte…

Même si cette pratique a du être très peu efficace, l’amphi E garde aussi la trace d’une activité sociale tournée vers la rencontre amoureuse ou amicale. Du moins, certaines tentatives de socialisation transparaissent dans les écrits : 22/10/2002 :
Bonjour je m’appelle Chloé et toi comment tu t’appelles
; 005_200
Je cherche des amis 06 18 18 — — ; Rendez-vous à lundi, Félix. On retrouve sur les tables quelques annonces, sémantiquement proches de celles des journaux ou sites web, ou encore des graffitis des toilettes : Petit brun cherche filles. 06 85 95 — –, ayant reçu comme commentaires : Mets toi aux garçons t’auras peut-être + de chance, et Dommage
Les nombreux cœurs entourant des prénoms ou des initiales rappellent les marquages à la craie dans les cours d’écoles ou les incisions au couteau sur les troncs d’arbres.

Certaines dates évoquent des statuts ou des listes d’événements auxquels les étudiants ont participé. Si quelques-unes font référence aux activités qui se sont déroulées dans l’amphithéâtre comme 27/01/06 CM médiéval L1, d’autres dates commémorent des événements extérieurs comme des concerts : 14 avril 2007 La Rochelle Céréales Killers ; 005_8_200
M 25/06/05 Parc des Princes, en référence au concert du groupe de métal Iron Maiden, ou encore Metallica 23/06/04 pour un concert dans le même stade.

Les étudiants communiquaient également entre-eux via des fanzines, magazines indépendants et auto-édités, qui étaient presque toujours portés par des associations étudiantes et parfois soutenus financièrement par la faculté. Cette pratique a aujourd’hui disparue, remplacée par les blogs et les réseaux sociaux.
La faculté des Sciences humaines et arts a connu quelques fanzines aux sujets divers. Citons Historix, consacré à l’histoire et édité par l’Association des Étudiants d’Histoire (AEH) dans la seconde moitié des années 1990 ou encore Fracasse, fanzine de bandes dessinées et d’humour édité par un collectif d’étudiants en Sciences humaines et arts entre 1999 et 2005.
Plusieurs graffitis de l’amphi E sont attribuables à l’un des dessinateurs de Fracasse.

 

 

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Ennui, désarroi et attente http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/lexposition/ennui-desarroi-et-attente/ Thu, 02 Apr 2015 18:07:55 +0000 http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/?p=289 006_2_200L’ennui naquit un jour de l’université

Les tables de l’amphi E témoignent du désarroi ou de l’ennui de certains étudiants.
Les séries de dessins abstraits et de motifs répétitifs sont les signes d’une attente graphique. De la même manière que l’on griffonne sans y penser sur des bouts de papier lors de conversations téléphoniques ou de réunions, pour passer le temps ou pour stimuler la concentration, les étudiants ont couvert les tables de ces archétypes géométriques, figures symboliques, ou représentations schématiques d’animaux, de têtes humaines…

L’ennui s’exprime également par l’inscription de phrases plus ou moins crues mais toujours très explicites comme :
006_200Mais pourquoi, pourquoi ? Pourquoi suis-je là ? ; Non aux cours ; L’histoire de l’art c’est la mort ; Je suis cette petite voix qui te dit de te barrer à la pause ; Vivement la fin ; Laisse nous sortir ! ; Craquage, 1h30 de cours. Reste 30 min !!! Comment faire ! ; C nul d’être là… je suis d’accord on se fait chier ; ou encore Another year and i’m still boring, annoté par une seconde personne d’un Ben non sois motivé.
Un dessin de pendu semble crier l’ennui et le désespoir d’un autre étudiant, tout comme les nombreuses mentions : Pourquoi ? ; HELP ; No futur for Us et Y’en a marre…
La figure du jeu de morpion se retrouve aussi très régulièrement sur les tables et témoigne d’une des activités de certains étudiants peu captivés par les cours magistraux.

006_3_200On observe quelques séries de barres de comptage rappelant le dénombrement des jours avant un évènement important ou une libération. Cependant, aucune hiérarchie de ces barres par groupe de sept ou cinq ne vient temporaliser cet acte et il est préférable d’y voir une simple évocation du temps qui passe lentement. Ces tracés font écho aux graffitis que l’on rencontre en milieu carcéral.
Le temps s’affiche sous la forme des heures qui passent : 9h30 9h40, ou seulement avec l’inscription de l’heure qu’il est : 17h40, voire par le dessin d’une montre, mais surtout sous la forme d’un compte à rebours de la durée qu’il reste à passer dans l’amphithéâtre avant la “libération” : 1h 55 min 40 min ; 20 min 10 min… ; 12 min 11 min 5 min…

La référence au groupe Europe à travers leur titre Final Countdown fait écho à ces différents comptes à rebours de l’ennui.

 

 

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La musique de l’amphi http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/lexposition/la-musique-de-lamphi/ Thu, 02 Apr 2015 18:28:27 +0000 http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/?p=314 007_6_200L’inscription Vive le silence rappelle que l’amphi devait d’ordinaire baigner dans un silence studieux ; cependant, à la lecture de ces tables se dévoile aussi une riche ambiance musicale et sonore.
De nombreuses références musicales des années 1970 à 2000 parsèment les tables, essentiellement sous la forme de noms de mouvements artistiques ou de styles musicaux, d’artistes, de groupes, d’albums, de titres ou encore de paroles de chansons, voire de commentaires sur la sortie d’un album. Avec plus de 200 inscriptions, les références musicales sont les plus récurrentes après les noms de personnes. On retrouve aussi parfois les identités visuelles des groupes très fidèlement reproduites comme celles de Metallica, des Red Hot Chili Peppers, ou de Einstürzende Neubauten…
Ces choix et ces goûts musicaux sont bien évidement commentés et critiqués par les autres étudiants. 007_2_200La lecture des tables s’apparente ainsi à l’écoute d’une sorte de “mixtape”.

Les scènes punk, rock, métal et underground sont les mieux représentées à travers l’inscription d’une bonne centaine de noms d’artistes internationaux tels que Korn, Iron Maiden, Nirvana, Metallica, System of a Down, Muse, T-Rex, NO FX, No use for a name, Sonata Artica, Sillmarills, Marilyn Manson, Mass Hysteria, Tool, Gojira, Meshuggah, Nigthwish, ACDC, Pleymo, Velvet Underground, Mano War, The Cure, Dream Theater, Megadeth, The Pogues, Therion, Led Zepplin, Soulfly, Rammstein, Nine Inch Nails, Corpus Delicti, Xmal Deutschland, Red Hot Chili Peppers, Rage Against The Machine, Pink Floyd, Sonic Youth…
On observe quelques manifestes en faveur du mouvement punk : Punk is not dead, ou de la culture gothique comme La culture gothique est belle et exquise, ne nous confondé pas avec les Satanistes / Goth is not dead.
007_4_200La scène poitevine est également représentée à travers quelques groupes locaux, comme Inis Gwenva, Seven Hate ou No Compromise, dont certains membres ont fréquenté l’université de Poitiers.

Ces inscriptions viennent nous rappeler un passé méconnu de l’amphi Descartes, un autre amphithéâtre de la faculté des Sciences humaines et arts situé au rez-de-chaussée du même bâtiment. Dans les années 1980, cet espace a en effet régulièrement servi de salle de concert pour la scène alternative et underground en mal de lieux pour se produire.
The Cure, important groupe du mouvement “new wave” s’y produit à deux reprises, le 27 octobre 1980 et le 8 octobre 1981, à la demande de l’association L’Oreille est Hardie. Cette association organise ensuite d’autres concerts dans l’amphi Descartes, notamment ceux des Rita Mitsouko et de The Residents. 007_200Le 9 juin 1984, le groupe Bérurier Noir, fer de lance de la scène alternative française, y donne un concert sur invitation de l’Association Musicale Poitevine (AMP).

Suite au succès du festival Le Meeting organisé en centre ville par L’Oreille est Hardie durant l’été 1983 – pour lequel s’est notamment produit le groupe Sonic Youth le 23 juin – l’association cherche des locaux plus grands et plus adaptés à la production de concerts de musiques amplifiées. De ce constat est née la salle Le Confort Moderne qui ouvre au public en 1985. L’amphi Descartes continue cependant à accueillir exceptionnellement des concerts jusqu’à la fin des années 1980, comme celui de Niagara le 13 mars 1987.

La chanson française n’est pas absente pour autant. La figure de Serge Gainsbourg s’expose régulièrement à travers des caricatures, des paroles de chansons, 007_5_200des titres et des noms d’albums : Mauvaise nouvelle des étoiles ; Melody Nelson

On note également quelques références au chanteur Christophe avec un passage de sa chanson Aline, à Johnny Halliday, à Joey Star, à Didier Super, aux groupes Bérurier Noir, Indochine ou Les Rita Mitsouko avec le refrain Andie dit-moi oui, ou encore à un répertoire plus classique de la chanson française avec les paroles de Mon Amant de Saint Jean.
Quelques compositeurs classiques comme Vivaldi ou Bach viennent compléter ce panorama musical.

 

 

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En cours magistral : de la feuille à la table http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/lexposition/en-cours-magistral-de-la-feuille-a-la-table/ Thu, 02 Apr 2015 18:29:55 +0000 http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/?p=321 008_2_200À partir du milieu des années 1980, l’amphi E était dédié surtout à l’enseignement de l’histoire de l’art. Il était mieux équipé pour la projection d’images que son amphi jumeau situé à l’étage inférieur, l’amphi I, qui accueillait notamment les cours d’histoire.

En histoire de l’art, le rapport à l’image est essentiel. Transposant les diapositives projetées à l’écran, les étudiants esquissaient dans leurs notes de cours des croquis de plans et d’élévations architecturales, ou des schémas évoquant les mobiliers archéologiques et éléments de décors… Jusqu’au début des années 2000, les étudiants ont ainsi rempli les marges de leurs notes de ces représentations schématiques. Cela leur permettait de conserver une trace des illustrations montrées en cours, en économisant sur le coût des photocopies, avant que cette pratique ne soit remplacée par des recherches iconographiques sur internet.008_3_200

Certains dessins semblent procéder d’un “glissement” de l’image projetée vers la feuille de prise de notes, puis sur le bois des tables. Parmi les graffitis figurent ainsi d’approximatives constructions, châteaux, mottes ou coupole, avec notamment un vague temple antique accompagné de la mention Le palais d’Ishtar.
Quelques dessins d’œil à l’égyptienne ou du pschent – la double couronne pharaonique – viennent ponctuer les tables. L’imaginaire médiéval est bien représenté, par des dessins de chevaliers ou d’armoiries.
Plus récurrentes, les références textuelles ou graphiques aux mousquetaires et au cardinal de Richelieu, ou encore à l’architecte Jacques Ignace Hittorff, ne passent pas inaperçues.
Quelques artistes contemporains, Paul Cézanne, Marcel Duchamp 008_200
par son œuvre LHOOQ, ou Andy Warhol ont également marqué l’amphi E de leur empreinte.

Cette pratique se retrouve dans l’amphi I, dont les tables étaient aussi couvertes de graffitis. L’amphi I n’a pas fait l’objet d’une documentation photographique systématique ; seuls subsistent quelques clichés publiés en 2006 sur le blog d’un étudiant. Ils témoignent de l’influence des cours d’histoire antique ou d’histoire maritime, avec des graffitis de soldats de la Grèce classique ou des scènes de batailles navales.

 

 

Lire la suite : Expressions politiques et mouvements étudiants

 

 

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Expressions politiques et mouvements étudiants http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/lexposition/expressions-politiques-et-mouvements-etudiants-2/ Wed, 01 Aug 2018 09:20:22 +0000 http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/?p=802 009_200Everyone go on strike

Les conflits sociaux et les différents mouvements étudiants que l’université a connus ne sont pas absents. 
Si les événements du printemps 1968 ou de l’hiver 1970-71 ne semblent pas avoir laissé de traces sur les tables, les mouvements étudiants les plus récents, ceux des années 2000, transparaissent à travers quelques mentions : 27/11/2003 grève, ou par des représentations de CRS dans l’amphi I…
Ces évocations restent assez limitées sur les tables de l’amphi E, car les AG étudiantes se déroulent traditionnellement dans le plus grand amphithéâtre de la faculté, l’amphi Descartes.

Sous la forme d’une référence au générique du film Star Wars, un étudiant commente la reprise des cours suite à l’arrêt du blocus de la faculté des Sciences 009_2_200
humaines et arts lors du mouvement étudiant contre la loi d’égalité des chances comprenant le CPE (contrat première embauche) :
Mars-Avril 2006 alors que le gouvernement dirige le pays d’une main de fer, la résistance étudiante s’organise contre les forces réactionnaires. Après de longues semaines de blocus, les soldats de l’individualisme triomphent des bloqueurs.

Les tables constituent aussi une tribune pour exposer ses revendications, opinions politiques ou visions du monde, à travers différents slogans : Fuck FN ; Viva Che Guevara ; No Pasaran ; Besancenot président ! ; Debré-Pétain, Même Combat ; Sauvez la France mangez Sarko ; Enfermez Jean-Marie Libérez Marie-Jeanne ; Les patrons c’est comme les cochons ; Mondialisation néolibéral = bâtisseurs de ruines ; l’urbanisme soviétique n’est pas notre plus grande réussite…

 

 

Lire la suite : Sur les traces de milliers de mains et de cerveaux

 

 

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Sur les traces de milliers de mains et de cerveaux http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/lexposition/sur-les-traces-de-milliers-de-mains-et-de-cerveaux-2-2/ Wed, 01 Aug 2018 09:32:59 +0000 http://graffitisamphie.conference.univ-poitiers.fr/?p=812 010_4_200Les graffitis des tables de l’ancien amphi n’ont laissé personne indifférent. La plupart des étudiants ont au moins lu ces inscriptions, à défaut d’y avoir participé.
Bien des éléments de cette œuvre tentaculaire nous sont encore incompréhensibles. D’autres pistes resteraient à explorer ou à développer : humour, société, politique, musique, culture populaire…

Entre imaginaire collectif et expression personnelle, les graffitis de l’amphi E nous proposent un état des lieux de la culture étudiante au tournant du millénaire.
Au-delà des références inscrites sur les tables, ces graffitis semblent bien nous raconter quelque chose : ils constituent une histoire matérielle de la vie étudiante autour de cet amphithéâtre.

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Au fil de ces lectures vagabondes, se dévoile surtout une vaste œuvre collective réalisée par des milliers de mains et de cerveaux, entremêlant les libres associations d’idées, et suggérant des interprétations multiples. Les étudiants ont pensé avec leurs doigts et ont matérialisé leurs méditations et réflexions en les inscrivant sur le bois des tables.
Ces graffitis incarnent les échos silencieux, les murmures et les pensées des étudiants ayant fréquenté ce lieu pendant près d’un demi-siècle.

 

 

 

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